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[blog] le coup de pied dans la portière

mardi 27 janvier 2009

C’était il y a trois ans. MamanDikoi organisait le traditionnel dîner de début d’année, habitude prise par GranMamanDikoi il y a bien longtemps. Tous étaient là, les oncles, les cousins, les frères et soeurs, ne manquaient que les neveux, trop nombreux, et trop jeunes, pour être intégrés. Bref, une bonne quarantaine de convives, dans cet appartement chic et chaleureux.

L’attaque, sournoise, est venue du GranCousinDisec, haut fonctionnaire dans la grande tradition, énarque, brillant et reconnu comme tel, ayant servi avec la même application - et efficacité - des gouvernements de droite comme de gauche, et dont la carrière en est la preuve.

“Ah, Ydikoi, je suis content de te voir ! Je parlais justement de toi à GraNeveuDisec il y a quelques jours, il me disait ‹‹quel dommage de gâcher une telle intelligence au service de conneries pareilles››”.

Je rigolais bêtement, ne sachant pas trop quoi répondre, à part que je l’invitais à en parler avec moi, et qu’au lieu de se fier à des rapports partiels - et partiaux -, il pourrait se renseigner à la source et comprendre ainsi les tenants et aboutissants d’un engagement en droite ligne de notre éducation commune. Mais que, sinon, je le remerciais, j’adorais toujours me faire insulter de la sorte.

N’étant pas masochiste au point de continuer la discussion, je changeai de cousin, pour dire bonjour à CousineDivoir, qui avec toute la finesse qui la caractérise, m’expliqua qu’elle m’avait récemment vu sur un média national. “Et tu sais, Ydikoi, je suis bien contente d’être mariée et ne plus m’appeler Dikoi, sans ça, ça me ferait presque honte d’avoir à expliquer à tout le monde que, oui, je suis ta cousine”.

Moi qui venait déjà à reculons à ce genre de cérémonie, juste poussé par le devoir familial, et l’insistance pressante de MamanDikoi, je commençais à trouver les couleuvres un peu trop grosses à avaler. J’allai donc récupérer devant le buffet bien garni, armé d’un verre bien rempli.

Mais il était dit que la soirée ne pouvait se terminer facilement.

J’étais assis à côté de MoyenCousinDisec, un garçon gentil, de quelques années mon aîné. Ce brave garçon, profondément humain sans aucun doute possible, m’expliqua, pour meubler un trou de conversation, qu’il est fervent supporter d’une certaine femme, fondatrice d’une association (mais surtout, j’imagine, pour lui, journaliste à La Croix, donc forcément bien), et qu’il trouvait, à la lecture de ses lettres, que nous étions “particulièrement égoistes” de refuser une mesurepensée pour notre bien”.

MoyenCousinDisec ne pouvait pas savoir qu’il était le troisième de ma liste, mais ma réponse, sèche, sur sa capacité à juger et insulter avant de comprendre lui fit imaginer qu’il fallait en rester là. Et pendant que les autres cousins attablés détournaient la conversation d’un air stupéfait, je m’éclipsai en expliquant à MamanDikoi pourquoi je ne restais pas aussi longtemps que prévu.

Finalement, la seule bonne surprise de la soirée était venue de l’oncle Divoir, qui du haut de ses 83 ans, avait été le seul à aborder le sujet d’une manière intelligente “Dis moi, Ydikoi, viens là, il faut que tu m’expliques pourquoi tu es dans cette organisation, ça m’intéresse beaucoup”. Et lui seul avait su (privilège de l’âge ?) mener une vraie discussion sur le sujet.

Pendant deux ans, je n’ai pas remis les pieds dans ces grand-messes familiales, et MamanDikoi ne s’est pas priée d’expliquer pourquoi (pas tellement qu’elle soit d’accord avec moi, mais la “bienséance” n’avait pas été respectée, et on s’attaquait à son fiston, quand même !) ; au point que certains cousins m’aient dit - et fait dire - qu’ils étaient désolés de ce qui s’était passé, qu’ils feraient attention à ce que ça ne se reproduise pas, qu’ils espéraient me revoir la prochaine fois, et tout le reste.

Cette année, c’était un peu différent : TanteDibien organisait pour une fois le dîner, et elle était sûre dès le départ : “C’est mon chouchou Ydikoi, je sais qu’il sera là”. Pas moyen donc de faire autrement qu’être présent, mais il y avait un moyen pour éviter de retrouver mes chers cousins : arriver le plus tôt possible, et repartir tôt également.

Aussi quand je suis arrivé, j’étais seul avec elle, ce que je voulais. Nous nous sommes assis, elle m’a dit qu’elle était contente de me voir, puis m’a demandé :
Dis-moi Yidikoi, j’espère que quand tu es à moto, tu ne donnes pas de coups de pied dans les portières de voiture ?

Vos commentaires

  • Le 05/02/09, France En réponse à : le coup de pied dans la portière

    Panel, c’est pas un gros mot, tu sais... et hélas, oui, je pense que la question et son corollaire sont d’actualité. En même temps, c’est valable pour tout plein de sujets, pas juste les motards.

    Ce qu’on ne connait pas fait fonctionner l’imagination (forcément puisqu’on connait pas) et l’imagination, c’est un truc qui est vachement influencable : 2 mots à la radio, 3 images à la TV et hop là, tous les motards filent des coups de pieds dans les portières. Mon neveu est motard, donc il file des coups de pieds dans les portières. CQFD. Ta tantine est un panel à elle toute seule.

    Désolée...

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  • Le 04/02/09, Ydikoi En réponse à : le coup de pied dans la portière

    Je poserais plutôt la question comme ça, c’est moins gênant :-D : se pourrait-il qu’elle ne soit pas la seule à penser ça ?

    Mais aussi son corollaire, franchement plus déprimant :-( : se peut-il qu’au début du XXIe siècle, certains pensent encore ça ?

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  • Le 04/02/09, France En réponse à : le coup de pied dans la portière

    Est-ce qu’on peut considérer que la tantine de Ydikoi est un panel représentatif à elle seule ?

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  • Le 30/01/09, Marge En réponse à : le coup de pied dans la portière

    Sûr, faut qu’on bosse la comm’, mais surtout faut qu’on pense à mieux cibler nos campagnes sur TanteDibien :-)

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  • Le 29/01/09, Ydikoi En réponse à : le coup de pied dans la portière

    tu as oublié les préjugés.

    et la comm’ est certes nécessaire, malheureusement pas suffisante pour les combattre

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  • Le 29/01/09, France En réponse à : le coup de pied dans la portière

    De l’ignorance naissent l’incompréhension et la discrimination.

    Y a pas, faut qu’on bosse la com... ;o)

    répondre ︎⏎

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