Escales
un Mahé 36 en vadrouille
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Samedi 15 février
Pas de grains de la journée, le vent a faibli.
RAS
Dimanche 16 février
Rafale de grains à l’aube, peut être pour compenser le manque d’hier ? On m’avait dit que plus le vent était faible plus le grain était violent, je l’ai confirmé.
Le logiciel de routage persiste à vouloir me faire arriver dans la nuit. Pas que ce soit un problème, l’accès à Ste Anne est facile, mais je n’aime pas arriver de nuit, par principe.
La mer est maintenant constellée de zébrures de rouille, des sargasses en ligne compacte.
Fin d’après midi chiante, à gérer des grains qui n’en finissent pas de se succéder, le vent qui refuse, puis adonne et refuse de nouveau, et qui passe de 13 à 25 kt pour revenir à 15. Je sais que c’est la règle du ‘jeu’, mais ce final est gonflant.
Lundi 17 février
Grand ciel bleu aujourd’hui, pas le moindre grain n’a osé montrer son bout de nez. Du coup, des conditions de navigation idéales, et presque sur la route directe. Il reste un peu plus de 200 milles, arrivée prévue après demain, mercredi.
Position du moment : 16°03N 57°19W
Mercredi 12 février
RAS … Ciel bleu, petits moutons, la mer est plus calme, plus ordonnée. Le vent s’est calmé. Peu de poissons volants, toujours plus de sargasses, en bandes désorganisées.
Ils sont arrivés tous les trois en fin d’après midi, à la queu-le-leu. Le premier grain m’est passé au cul, je venais juste de finir de prendre le ris, alerté par l’écume des vagues qui le précédait. Il m’est passé au cul, j’ai juste eu droit à un peu de pluie et de vent. Les deux autres, plus imposants, lui couraient après.
L’avantage des grains, c’est leur cohorte de nuages, qui me permettent, enfin, d’avoir un coucher de soleil spectaculaire. Jusqu’ici soit il n’y avait aucun nuage, soit le ciel était gris. Point de nuances de rose et d’orange. Cette fois-ci j’ai été gâté.
Jeudi 13 février
Il est 4h30, encore nuit noire, plus pour très longtemps. Le vent s’est enfin réveillé, mais toujours aussi joueur, il fait des écarts de 25°. La lune a déjà perdu son premier quart, il fait bon dehors.
Ma cartographie me donne entre 4 et 5 jours de navigation encore, probablement un ou deux de plus en fait. Pour l’instant je pointe vers la Guadeloupe, encore un peu trop au nord. Le bateau file presque à plat, la houle a baissé, ce n’est plus qu’un petit train de bosses qui régulièrement pousse le bateau, et lui donne un peu de vitesse, comme si elle voulait le presser d’arriver.
Vendredi 14 février
Le soleil s’est levé il y a moins d’une heure, avec une barre grise à l’horizon. Les grains déboulent en rang serré, le vent qui monte et tourne un peu d’abord, puis la pluie. Ca dure quelques minutes pour chacun, et deux ou trois heures après, le ciel est dégagé. Et puis ça a repris vers 11h, jusqu’à la fin de l’après midi. Le vent passe de 13 à 30kt, et de 65° à 110° ! J’ai eu droit à un bon bain, en terminant d’ariser. Les drisses suintent encore, avec l’eau de pluie, la poussière de roche de Lanzarote.
Je viens de me faire dépasser proprement par un VOR 65, « Sissi ». Ce sont des bateaux de course de 20m, créés pour la Volvo Océan Race. Le skipper m’a salué par la VHF, ils sont 17 à bord, et font du 21 kt quand je suis à 7 !
Position du moment 14°57N 51°01W
Dimanche 9 février
La mer s’est calmée. Enfin, non, pas vraiment. Disons qu’elle s’est « étalée », qu’elle a pris ses marques, entre houle et houle secondaire, l’une tamisant l’autre, elles se combinent en une troisième, de biais. C’est confus, ça secoue, mais au moins les coups de butoir sous la plateforme, juste entre les deux coques, sont passés de constants à exceptionnels. C’est « normalement » confortable, enfin.
Curieusement avec mon rythme d’hippocampe (je ne suis pas sûr qu’on trouve beaucoup d’escargots sous la mer), j’ai quand même fait 120 mille sur ces dernières 24h, j’aurais pensé moins.
J’ai terminé hier le deuxième tome d’Hyperion, je l’ai dévoré, il me tarde de lire la suite. J’ai enchaîné aujourd’hui avec Barjavel, que j’avais déjà lu en son temps et dont le Grand Secret, maintenant comme autrefois, se dévore à toute allure. C’est plus facile, plus daté, mais c’est quand même bon.
m’a abandonné, lâchement, en cours de chargement de la météo : il ne répond plus à aucune commande, et plante au moindre bouton d’instruction ou affichage. Heureusement il semble encore bon à récupérer la météo. Heureusement (bis), j’avais aussi acheté Navionics « pour au cas où ». Eh bien le voilà.
Lundi 10 février
Voilà, j’ai atteint « l’autre » 1000 milles, celui avant l’arrivée. Comme les alizés soufflent d’est en ouest, je vais faire un peu plus puisque je dois faire des zigzags autour de cet axe, mais je pense raisonnable de tabler sur une arrivée avant le 22.
Retour du soleil aujourd’hui, le plafond nuageux a fini par se crever. Je retrouve du coup ce soir la lune, pleine, qui illumine la mer de mille feux, c’est spectaculaire. J’aurai eu de la chance de l’avoir avec moi tout le long du trajet.
Mardi 11 février
La mer est toujours parée de son petit panache blanc, mais sous le soleil, cette livrée ne fait que mieux ressortir le bleu intense de l’eau, chargé de profondeur. J’ai vu mes premières sargasses, juste des rameaux isolés. C’est bien tôt, et bien loin. Par contre, peu de poissons volants. Trois se sont échoués sur Escales en tout, sur les trois derniers jours. Et à peine quelques uns qui s’envolent devant moi, apeurés. Ils ont quelque chose de magique à regarder dans leur vol, s’évertuant à rebondir, encore et encore, sur la prochaine vague, d’un énergique coup de queue.
Je croise le Heroic Ace. Le précédent, vendredi dernier, était sur la route Europe - Amérique du Sud, celui là sur celle USA - Afrique. Avec la houle, je ne l’ai vu qu’à 1/2 heure de moi, ses lumières étaient plus faibles que les étoiles, et apparaissaient / disparaissaient au gré de la houle. Quel hasard fait que nous nous retrouvions ainsi, au milieu de rien, à presque équidistance des Amériques et de l’Afrique, à moins de deux kilomètres ?
Il est 20h, 23h à Paris. La lune se lèvera plus tard, elle n’est pas encore prête à faire son entrée.
Position du moment 15°25N 44°52W
Jeudi 6 février
Temps gris, aujourd’hui. Un gris vaguement bleuté au plus haut, qui laisse parfois passer un faible éclat, assez diffus, de soleil. Et juste dessous, des petits moutons, en rangs assez serrés, d’un dégradé de gris. Alors la mer est grise, sauf pour l’écume des vagues, blanche, lorsqu’elles se heurtent à la houle.
La machine a laver s’est remise en route, l’accalmie aura été de courte durée. Et c’est sans compter la belle augmentation des alizés qui est promise pour cette fin de semaine.
Au gré des rafales, je gagne un jour, ou deux, puis les perd presque aussitôt dans les estimations d’arrivées. C’est encore loin, de toute façon, plus de dix jours.
Vendredi 7 février
Tu n’es pas belle, quand je te regarde maintenant, blanche d’écume comme de rage contenue, plissée de mille rides qui troublent à peine les chemins tortueux que les vagues dessinent et effacent aussitôt. Tu es brutale, sonore, jaillissante, impétueuse.
J’ai rencontré un navire, aujourd’hui, le Sakizaya Respect. A plus de 20km de moi, il trace sa route vers le sud ouest, le Brésil. Je me demande s’il ressent cette houle, s’il est destabilisé aussi par ces vagues qui viennent taper contre son flanc.
« on » me dit qu’il n’y a aucun retour à la ligne dans mes textes, un bug. Ca doit être doublement indigeste à lire, ces carnets :-) (désolé, hein, pour ceux qui s’accrochent)
Samedi 8 février
C’est amusant comme l’appréhension disparaît aussi vite que l’évènement est là. Les 30 nœuds ont surgi plus tôt qu’espéré, et plus fort, bien sûr. Pendant plus de six heures, j’ai surveillé le bateau, regardé comment il naviguait dans ces rafales à plus de 35 kt, apprécié comment le pilote récupérait la situation quand il partait en surf à plus de 14 kt dans près de 3 mètres de creux. Tout allait bien, sauf le confort. Impossible de se marcher sans se tenir fermement, les objets qui tombent au sol, le bruit incessant, et fort, de l’eau sur la coque, du vent dans les haubans, des craquements du bateau. Alors j’ai fait comme d’habitude : sous-toilé, grand voile affalée, un bout de génois à l’avant, le bateau avance tout tranquillement, se dandine un peu, le silence est retombé, juste brouillé par les grésillements erratiques de la VHF. C’est doux, presque calme, en tout cas confortable. Voilà qui me fera le WE et le temps que passe cette bourrasque.
Position du jour 16°11N 37°55W
J’espérais que voyager cette fois en camping-car t’offrirait au moins plus de confort : un doux bercement plutôt qu’une essoreuse... A côté de tes aventures, je pense qu’on pourra accepter l’inconfort de te lire sans retours à la ligne ! Tranquillement posés à terre, on t’envoie du soleil et du vent. Biz
Lundi 3 février
Une heure du mat’, j’ai des frissons, je claque des dents et je monte le son … Clac, fait la voile en tombant dans le dévent : je réalise soudainement, le vent qui vire, 40°, me tirant au passage du royaume de Morphée. Le temps d’empanner, clac clac, et c’est reparti, mais dans l’autre sens. Une heure sur le pont, à attendre qu’il se stabilise, ça semble être bon.
Avec un peu de chance, ce régime méditérannéen de chasse au vent qui tourne et se cache est terminé. Place aux alizés, ou ce qu’il en reste, ils n’ont pas l’air bien vaillants.
Je viens de passer le Cap Vert et, 1000 milles (soit env 1800 km) depuis les Canaries.
Comme d’habitude, les prévisions étaient sous-estimées, le vent est bien là (et la mer aussi, façon machine à laver).
Mardi 4
Je leur avais dit, à ceux que la traversée effrayait, du haut de mon expérience de vieux loup de mer avec une seule transat à son actif : “vous verrez, un vrai tapis roulant. Inconfortable, mais un tapis roulant”.
Comme d’habitude j’aurais mieux fait de fermer ma grande gueule. Parce que, hopitin ! Je le savais, hein, je le savais. Mais j’avais oublié, d’une force !, que c’était inconfortable !
Plus de bateaux à mon AIS depuis hier soir, c’est à dire aucun cargo à moins de 100 milles, aucun voilier à moins de 30 ou 40.
J’ai eu les Tibor par sms, ils sont un peu plus au nord que moi, 560 milles devant environ. Ils se traînent, un peu comme moi.
Mercredi 5
J’aimerais bien connaître le nom de ce petit oiseau rase-les-vagues, à peine plus gros qu’une hirondelle. Je me demande bien ce qu’il peut trouver à manger dans cette étendue désertique.
Dérouté (mais de peu) à la demande du CROSS pour prendre des nouvelles d’un voilier avec malade à bord, ils font route vers le Cap Vert, contre vents et courant. Ca doit être dur à bord. Finalement, j’aurai couru plus de temps que prévu, près de 6h, à la poursuite de ce bateau, tout ça pour deux maigres conversations VHF. Qu’importe, il m’a dit que cela lui avait fait du bien, mais il a aussi dû être déçu, pensant sans doute que je l’escorterais jusqu’à Mindelo. « réconfort moral », avait dit le CROSS. J’ai fait ce que j’ai pu : pas grand chose.
Finalement la mer s’est un peu calmée, ou alors elle a tourné, c’est plus probable. La navigation est presque belle, du coup.
Vos commentaires
# Le 18/02/20, Bernard et Pascale En réponse à : Carnet de bord 8
Super !
C’est une bonne option de choisir d’atterrir de jour même si l’arrivée sur St Anne est plus cool que celle sur le Marin...
On te souhaite de conserver de bonnes conditions de navigation jusqu’à l’arrivée !
# Le 18/02/20, France En réponse à : Carnet de bord 8
Bientôt le rivage, le port, la plage et les gens... Merci pour la traversée.
Adieu mer des Sargasses !
Sainte Anne Guadeloupe ?
Bisous ami.